Neutraliser ou désincarcérer ? En hommage au Père Hamel

Par Mathieu Monconduit

L’escalade dans l’horreur a choisi pour cible, au soir de sa vie, un homme symbole d’engagement inconditionnel dans le service d’Eglise auprès de tous les hommes dans diverses paroisses de la rive sud de l’agglomération rouennaise. Les multiples témoignages et manifestations collectives d’hommage montrent la force d’exemplarité de telles vies.

Ces paroisses étaient celles de communes à forte mixité culturelle et religieuse, où se développe particulièrement, avec la diversité de ses composants, le chantier de la construction sociétale, chantier qui doit être poursuivi et porté par un souffle renouvelé. Le Père Hamel y était lui-même engagé.

Certains hommes, au nom d’un Djihad dénaturé, stérilisent la sève des religions et les réduisent à des instruments de destruction massive de sociétés humaines.

Nous croyons, au contraire, que la recherche sincère de Dieu nourrit la vie d’hommes et femmes, artisans de cette construction sociétale, et les façonnent selon différentes cultures et pratiques religieuses. Nous ne pouvons nous résoudre que, dans le cadre de cette construction, la « neutralisation » radicale soit la réponse concluant le parcours en dérive de jeunes questionnant nos sociétés. Leur radicalisation et adhésion totale à des communautés de rejets n’apportent à leur recherche de sens existentiel d’autre réponse que la violence. Contre les manifestations de cette violence nous développons, ici et ailleurs, un arsenal répressif, au risque d’excès alimentant eux-mêmes la violence. Si une guerre doit être menée, ce n’est pas seulement contre ces communautés de rejets, mais aussi contre ce qui les nourrit, les rend attractives, c’est contre des pouvoirs détournés de leur usage pour le bien commun, (telle l’appropriation de l’argent ou de ressources naturelles…) les transformant en instruments d’exclusion du travail et de la re-co-naissance sociale. C’est un combat pour désincarcérer ces jeunes des épaves mortifères, physiques et psychiques, où ils ont été attirés et se trouvent maintenant, pour leur redonner vie et non les exclure définitivement.

Mais contrairement à une guerre conventionnelle contemporaine , faite de drones, de bombardements, de torpillages informatiques, menée à distance, c’est un combat de proximité où la première arme est le changement de nos comportements, avec leurs effets trop souvent délétères, locaux, nationaux et internationaux ; c’est un combat pour construire une société inclusive de chaque être aimé de Dieu. L’énergie nécessaire pour le mener, le croyant la cherchera dans la prière, le non croyant dans le recueillement, les uns et les autres loin des anathèmes et des formules simplificatrices.

Mathieu Monconduit, membre du CA des SSF, président des Semaines sociales de Haute Normandie

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