La pauvreté

Par Paul Champsaur

La pauvreté ne se définit pas simplement. La comparaison est essentielle à l’intérieur du pays entre groupes sociaux et dans le temps comme entre pays. Le plus simple c’est la « pauvreté monétaire ». Est pauvre la personne dont le revenu est inférieur à un « seuil de pauvreté ». Pourquoi ne pas le définir comme le revenu permettant d’acheter des quantités minima, définies à priori, de biens et services nécessaires ? Les USA ont essayé cette méthode. Cela n’a pas bien marché. Le seuil avait tendance à baisser sensiblement par rapport aux revenus et le nombre de pauvres à devenir très faible. Aussi l’Europe a-t-elle choisi une autre méthode relative. Le seuil est alors une fraction, disons 60 %, du revenu médian qui sépare la population du pays en deux moitiés égales.

Une autre approche, de « pauvreté en conditions de vie », mesure le manque d’éléments de bien être matériel. Cette approche se prête mal à des comparaisons internationales et sa mise en œuvre n’est pas aisée. Aussi n’examinerons-nous que la pauvreté monétaire avec la définition européenne. Tous les membres d’un ménage ont le même revenu obtenu en divisant le revenu total par le nombre d’unités de consommation du ménage. Celui-ci est l’addition d’une unité pour le premier adulte, d’une demi-unité pour chaque personne supplémentaire de plus de 14 ans, enfin de 0,3 unités pour chaque enfant de moins de 14 ans.

En France en 2013 le seuil de pauvreté par unité de consommation et donc pour une personne seule était de 1000 euros par mois. Le taux de pauvreté, la proportion de pauvres dans la population, était de 14%. Le SMIC mensuel est supérieur au seuil de pauvreté. Le socle du revenu de solidarité active (RSA), l’ancien RMI, était de 493 euros et l’allocation de solidarité aux personnes âgées de 787 euros. Le taux de pauvreté était de 17,9% en 1970. La revalorisation du minimum vieillesse l’a fait baisser. Il était de 13,5% au milieu des années 80 puis de 13% au début des années 2000 pour remonter à environ 14% à la suite de la crise de 2009.

La France avec quelques pays de l’Europe du Nord fait partie des pays ayant les taux de pauvreté les plus faibles. La pauvreté serait plus faible en Europe qu’ailleurs. Le taux moyen pour l’Europe était de 17% en 2013. L’Allemagne et le Royaume-Uni ont des taux voisins. Les pays de l’Europe du Sud sont au-dessus. Les pays ex-communistes couvrent toute la gamme depuis le taux le plus bas en République Tchèque jusqu’au plus élevé en Roumanie. Dans beaucoup de ces pays le revenu moyen est inférieur au seuil de pauvreté français.

La protection sociale française relève les revenus les plus bas et compense en partie le chômage plus élevé. Cependant elle ne peut faire sortir de la pauvreté un ménage avec des ressources propres faibles ou nulles. Les pauvres sont surtout des personnes sans emploi, des membres de familles monoparentales ou de familles nombreuses. Cette approche statistique ne permet guère d’analyser la grande pauvreté. Pour diverses raisons (immigration illégale, travail au noir, maladie,…) les personnes très pauvres évitent les enquêtes statistiques et les procédures administratives.

Paul Champsaur, Haut fonctionnaire

Sources INSEE

2 Commentaires

  1. Hugo

    Excellent article ; merci les statistiques!
    même si la pauvreté est bien autre chose que des chiffres froids.

  2. Jean-Pierre

    Il serait très intéressant d’avoir l’analyse par Paul Champsaur du rapport du Secours catholique sur la grande pauvreté http://www.secours-catholique.org/sites/scinternet/files/publications/rs15couv-bd.pdf.
    Certes il s’agit d’une collecte d’information qui reste française et s’appuye essentiellement sur les situations et les demandes des personnes avec lesquelles le Secours catholique est entré en contact mais il me semble intéressant de constater que la grande précarité augmente en France alors que, globalement, la pauvreté diminue. Cela ne signifie-t-il pas qu’il y a un creusement des inégalités et un affaissement des classes moyennes ?

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