Garissa : frères parce qu’étudiants

Par Annabel Desgrées du Lou

Cette semaine, dans tous les laboratoires de recherche de l’Institut de recherche pour le développement (IRD), établissement public de recherche français, une minute de silence a été observée en mémoire des personnes massacrées par les chebabs dans l’université de Garissa, au Kenya.

Cette démarche, qui arrivait juste après la polémique franco-française autour des affiches pour les chrétiens d’orient à la RATP, m’a tout d’abord surprise (j’appartiens à cet institut) : dans un établissement public français, tous les agents se sont ainsi interrompus et rassemblés dans ce qui ressemblait fort à une prière qui n’aurait pas dit son nom …

Tous y ont participé, sans polémique stérile sur le caractère laïc ou non de la démarche (enclenchée d’ailleurs par un président pas du tout chrétien).

Tous se sentaient en effet en lien avec les personnes assassinées car il s’agissait d’étudiants d’une université partenaire de l’IRD. La mission de cet institut étant la formation pour et par la recherche dans les pays en développement, les chercheurs, techniciens et administratifs de l’IRD ont tous travaillé ou séjourné dans un pays en développement, car former demande du temps. Dans cet institut, Les étudiants de Garissa ne sont donc pas perçus comme les habitants lointains d’un pays lointain mais comme des étudiants, frères de ceux que nous encadrons, que nous accueillons en France et qui nous accueillent dans leurs pays.

J’ai touché là du doigt combien la solidarité repose sur la fraternité, qui repose elle-même sur le fait d’avoir partagé quelque chose avec l’autre. Développer les occasions de partager reste donc le principal rempart contre l’indifférence. Merci à Erasmus et à toutes les occasions qui sont données aux jeunes d’aller partager ailleurs, pour élargir l’horizon de leur fraternité.

Mais Erasmus reste européen, et les échanges universitaires restent bien souvent entre universités ou écoles occidentales. Nous proclamons tous que «les voyages forment la jeunesse ». Donnons aux jeunes l’occasion, malgré la course aux diplômes, d’aller aussi dans ces pays (ou dans des quartiers français !) hors des sentiers dits d’excellence, pour y passer du temps. Du temps pour apprendre autre chose, pour servir peut être, pour partager surtout, pour découvrir des frères.

Annabel Desgrées du Lou, membre du CA des SSF

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