Par Dominique Quinio
Ajouter des paroles aux paroles, des commentaires aux commentaires, comme un flot débordant. Même plusieurs jours après le drame qui a frappé Nice et sa célèbre promenade des Anglais, faisant plus de 80 morts et de nombreux blessés, de tous âges, de toutes nationalités, de toutes confessions, les mots vous manquent.
Même ceux qui voudraient exprimer de la compassion, s’associer au malheur, faire monter des prières vers un Dieu de Miséricorde, appeler à résister ensemble dans la dignité, semblent bien misérables. Et, prononcés une nouvelle fois, après les attentats de Toulouse en 2012, après ceux de janvier ou de novembre 2015 à Paris, ils paraissent tellement impuissants, tellement dérisoires.
Pourtant, nul ne résiste à la tentation. De peur, sans doute, de paraître indifférent ou résigné. Nul ne se prive de juger les faits et les circonstances, d’en tirer des leçons pour l’avenir, même si aucun de ces événements ne peut être exactement comparé aux précédents, si les auteurs ont des profils différents, si les moyens utilisés n’ont rien à voir les uns avec les autres. Responsables politiques, experts en tous genres, médias d’information continue et réseaux sociaux (et le blogueur des Semaines sociales n’y échappe pas) meublent ce qu’il est désormais convenu d’appeler ce temps de sidération qui succède au drame ; ils le saturent de paroles et d’images qui tournent en boucle, recueillant des témoignages à chaud, poignants ou incongrus, ne reculant devant aucune image à diffuser pourvu qu’elle fasse le « buzz ».
Limiter ses interventions (si l’on est président de la République, ministre de l’intérieur ou membre de l’opposition) serait mal compris, mal perçu, comme un aveu d’inaction, pense-t-on. Les responsables religieux, et les musulmans plus que d’autres, réagissent sans tarder pour dire leur indignation, leur solidarité et leur même effroi devant de telles violences dans lesquels ils ne se reconnaissent pas. Cela suffira-t-il à ceux qui, aujourd’hui, accusent l’islam de bien des maux ?
Que la revendication par le groupe État islamique soit dictée par la réalité des liens entre l’auteur de l’attentat ou purement opportuniste, ce flot de mots et de commentaires est comme à chaque fois pour Daech une victoire, celle de sa propagande qui incite ses « soldats » à se lancer par n’importe quel moyen contre l’ennemi que représente l’Occident et la France en particulier.
Face à ces menaces, toutes les mesures de sécurité doivent bien évidemment être prises, dans le respect des règles d’un État de droit, sans surenchère démagogique. Mais c’est dans la solidarité que les Français sauront vivre entre eux, si différents soient-ils, que se construit la meilleure riposte aux fanatismes en tous genres. Or ce combat de la fraternité ne se paie pas de mots, il se vit, il se manifeste en actes. En silence, le plus souvent.
Dominique Quinio, présidente des SSF
Je suis en total accord particulièrement avec le dernier paragraphe de cet texte… mais c’est cela le plus complexe.
1- Comment comprendre ces gestes criminels (cf. le roman l’Attentat de Yamsina Kadra)? Ces actes law coast sont imprévisibles et imparables sauf que de souhaiter un monde à la Big Brother sans liberté et sans dignité.
2- Comment quitter ces discours populistes et faire comprendre que c’est notre manière de vivre ensemble qui est en cause? » Une nation est donc une grande solidarité, constituée par le sentiment des sacrifices qu’on a faits et de ceux qu’on est disposé à faire encore. Elle suppose un passé ; elle se résume pourtant dans le présent par un fait tangible : le consentement, le désir clairement exprimé de continuer la vie commune. » Ernest Renan
3- Comment faire silence et se retirer dans ces groupes, familles, amis, connaissances, pour ressérer les liens afin qu’ils n’aient même pas notre haine (cf.Antoine Leiris)