Les limites de notre politique de défense

Par Jean-Pierre Rosa

Il y a déjà un moment que je m’étonne de voir la France – un si petit pays – engagée dans autant de théâtres d’opérations militaires. Un moment aussi que je me demande pourquoi la France reste un des plus gros exportateur d’armes. Le cinquième, derrière les Etats-Unis, la Russie l’Allemagne et la Chine.

La réponse est en fait toute simple, et un peu consternante : la politique de défense de la France est en partie dépendante de nos ventes d’armes qui rapportent directement à l’État les ressources suffisantes pour exister ! Non seulement mais ces ressources – ou leurs prévisions – sont inscrites dans la loi, au titre des ressources de la loi de programmation militaire. Elles sont donc détaillées, votées par les sénateurs et les parlementaires.

Ainsi, pour la période qui vient – 2014-2019 – les ventes de Rafale déjà acquises sont actées et leur impact financier comptabilisées dans le projet de loi.

D’un point de vue strictement stratégique, il me semble que c’est exactement ce que l’on appelle une politique de gribouille ou l’arroseur risque toujours d’être un jour arrosé. Ou pas payé ! Ce qui est arrivé dans le passé avec une série de Mirage vendus à l’Irak de Saddam.

Non seulement mais d’un point de vue moral, il y a tout de même là quelque chose de choquant. Alors que les opérations militaires françaises sont souvent des opérations morales, réalisées à la demande des Etats, la plupart du temps pour le compte de la communauté internationale ou d’un groupe d’Etats, les ventes, elles, ne se fondent sur aucun critère de ce type.

Enfin, d’un point de vue strictement citoyen, on peut se demander s’il est bien sain de faire croire à une nation qu’elle peut encore mener grand train sur le plan de la défense. Ne serait-il pas plus logique de prélever l’impôt correspondant à une telle politique ? Ou de renoncer à jouer – seul en tous cas – un tel rôle ? Vivre au-dessus de ses moyens a toujours été une tentation pour les gouvernements successifs. Guerroyer au frais de la princesse, est-ce vraiment une bonne idée ? N’y aurait-il pas là place pour une concertation européenne plus poussée ?

Jean-Pierre Rosa, de l’équipe du blog

1 Commentaire

  1. Merci, Jean-Pierre. Tout à fait d’accord avec toi. Et il y aurait encore plus à dire. Avoir toujours conscience par exemple que toute arme vendue est susceptible d’être utilisée et donc de faire des morts et des blessés. On est conscient de cela quand on vend des armes, ou bien on pense que nos armes sont « propres » et qu’il vaut mieux que les pays en difficulté s’approvisionnent chez nous (qui sommes « du bon côté ») plutôt que dans des pays « foi ni loi »…!!?

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