Par Jean-Pierre Rosa
Le sondage Opinionway commandé par le journal La Croix, les Semaines sociales de France et les Apprentis d’Auteuil est riche d’enseignements. Non pas tant sur le rôle réel que joue l’école mais sur la représentation que les adultes et les jeunes s’en font.
De ce point de vue, il ne fallait pas s’attendre à une révolution : la famille garde le premier rôle et l’école est vue avant tout comme dispensateur de savoirs (89%), la famille se réservant le rôle de veiller à l’épanouissement de l’enfant, d’apprendre à ses chères têtes blondes les règles de la vie en société, de le préparer à être citoyen et à assumer son rôle de futur parent.
Pourtant, au fil des questions, on lit une double évolution : d’un côté les parents manifestent une certaine défiance vis à vis de l’école (on ne se tourne pas vers l’école en cas de difficulté, et on ne se souvient pas qu’un enseignant ait joué un rôle majeur dans sa propre éducation), mais de l’autre on voit l’école promue au rang de conseiller d’orientation professionnelle (61%), même si, lorsqu’il s’agit de choisir un « métier », la proportion baisse légèrement mais pas vraiment significativement (52%).
En réalité tout se passe comme si la professionnalisation des rôles sociaux progressait dans les représentations mentales (ainsi 43 % des parents se tourneraient vers un « professionnel » – psychologue, service social, éducateur – en cas de difficulté de l’enfant) mais que cette professionnalisation acceptée se trouvait en quelque sorte sous le contrôle – un peu soupçonneux (?) – de la famille.
Bien sûr on ne peut pas tirer d’un simple sondage ponctuel une conclusion générale mais on peut tout de même se demander si ce n’est pas de ce côté qu’il faudrait chercher les racines d’un certain désamour entre la famille et l’école. Les parents acceptent de plus en plus l’école dans un rôle de préparation à la vie professionnelle de leurs enfants mais ils ne le font pas « de gaieté de cœur ».
Du coup, et sous réserve d’autres études qui confirmeraient cette tendance, on peut penser que l’un des grands enjeux, pour l’école et les familles est de dialoguer davantage – non pas sur les savoirs, là on fait confiance – mais sur la vie professionnelle et l’avenir des enfants.
Jean-Pierre Rosa, membre des SSF