Par Jean-Marie Martin, de l’Oratoire.
Le « Train de la mémoire » s’adresse à des élèves de première-terminale de quinze ou vingt établissements privés. Il emmène, tous les deux ans, 500 personnes à Auschwitz-Birkenau. Extraits de l’intervention liminaire du Père Jean-Marie Martin qui accompagnait le 9ème voyage de ce « Train ».
« Je voudrais vous remercier tous d’avoir bien voulu entreprendre ce voyage. C’est courageux, c’est estimable, mais vous comprendrez bien vite que c’est responsabilisant. Ce voyage en humanité nous permettra d’ajuster la Mémoire, de nourrir la Mémoire, de sauver la Mémoire, d’honorer la Mémoire, pour contribuer à bâtir positivement notre avenir commun… À partir de l’œuvre indispensable et vitale de la Mémoire, nous atteindrons la dimension du Cœur, en éclairant et affinant notre Conscience. Nous n’allons pas à Auschwitz pour engranger des connaissances : la connaissance la plus inattendue que nous ferons, c’est celle de nous-mêmes, au cours d’un voyage qui va se révéler voyage intérieur porteur d’une grande fécondité.
La Shoah est l’inversion totale et radicale du principe d’évolution, d’humanisation, de civilisation, de rédemption, de divinisation : inversion totale du projet de Dieu. Le créé se brise sur ce point Shoah, il se diffracte pour se perdre dans le néant. Au point Shoah, la Conscience est souillée, distordue, piétinée, engloutie, et puisqu’elle est liée à la perception divine, elle entraîne avec elle dans son déclin la Conscience d’une existence de Dieu, du Dieu qui semble laisser en silence exterminer son Peuple. Mais que dire plutôt du silence des hommes ?
Sachons faire de notre rencontre avec la Shoah une chance pour notre monde contemporain et pour l’avenir de notre humanité. Chacun selon ses dons et ses aspirations. Et ce devoir incombe à tous les hommes de bonne volonté, et pas seulement au peuple Juif, ou aux groupes humains qui furent touchés également par le processus nazi d’extermination, Il faut bien reconnaître, avec courage et lucidité : le mal que l’humanité a été capable de produire en son sein par la Shoah concerne tout le genre humain.
Les cendres des victimes d’Auschwitz seraient-elles plus chaudes que nos cœurs ? Puissent les feux des bûchers se transformer en lumière éclairant nos cœurs. Les cendres qui sont montées vers le ciel par les cheminées des crématoires sont retombées sur notre terre. Puissent-elles l’ensemencer de vigilance et d’éveil, de tolérance et d’accueil, de justice et d’amour… »