Le dialogue, condition d’une éthique des technologies

Par Claude Gressier

Dans son livre «  Les nouvelles biotechnologies en questions » et dans la conférence qu’il a faite le 9 octobre à Versailles, le Père Thierry Magnin, recteur de l’Université Catholique de Lyon, décrit les progrès fulgurants des technosciences dans le domaine de la biologie.

Les progrès dont il s’agit concernent la biologie de synthèse, croisement des nanotechnologies, de la biologie et des technologies de l’information et de la communication (NBIC). La nano-bio-ingénierie consiste à utiliser ou à s’inspirer des mécanismes du vivant pour imaginer et réaliser des nanodispositifs. Ainsi, écrit-il, sont conçues des bactéries reprogrammées artificiellement pour localiser et détruire des cellules cancéreuses, mais aussi des biocapteurs et des nanolaboratoires permettant d’analyser le comportement des cellules, y compris dans le corps humain.

Quelles perspectives enthousiasmantes !

Mais il est aussi possible de fabriquer des produits synthétiques que la nature elle-même n’a pas donnés. Pour certains chercheurs, notamment aux États-Unis, le but clairement énoncé est d’augmenter les capacités cognitives humaines, d’améliorer les capacités physiques et la santé de l’homme.

Il s’agit ici de repousser les limites de l’humain, mais jusqu’où et à quel prix ? Ces perspectives posent de sérieux problèmes éthiques et Thierry Magnin reprend la proposition de Hans Jonas : « Agis de telle manière que ton action soit compatible avec la permanence d’une vie authentiquement humaine ».

Thierry Magnin ne nous dit pas : « ceci est éthique, cela ne l’est pas ». Il nous dit qu’un important travail de recherche en éthique est devant nous et il invite à un dialogue entre les technoscientifiques, les philosophes, les tenants des sciences sociales, les juristes, les industriels et également avec le grand public.

Il constate avec tristesse que ce dialogue est souvent difficile car il existe des refus de dialogue : refus de la part de certains groupes conservateurs qui sont particulièrement technophobes : le Père Magnin a vu des personnes venir à une journée d’études au CNAM sur les nanotechnologies pour empêcher son déroulement en disant : « Dialoguer c’est déjà accepter ». Mais les chercheurs ne sont eux-mêmes pas toujours partisans du dialogue, par peur de perdre leur indépendance de recherche, même si des problèmes éthiques se posent. Les techniciens ou les pouvoirs publics, soi-disant pour ne pas inquiéter la population font des déclarations lénifiantes comme cela a été fait pendant des années sur le nucléaire ou encore sur le nuage de Tchernobyl qui se serait arrêté à la frontière française. De telles attitudes alimentent la technophobie et la méfiance vis-à-vis des « sachants ».

Nous chrétiens sommes-nous vraiment toujours vraiment ouverts au dialogue sans a priori  et pour cela faisons nous l’effort de nous renseigner sur les progrès des sciences et techniques ?

Claude Gressier est responsable des antennes des Yvelines des Semaines sociales de France.

2 Commentaires

  1. JPR

    Thierry Magnin participera, avec bien d’autres, à la toute prochaine session des Semaines sociales de France qui se tient du 21 au 23 novembre, à Lille, sur le thème : « l’Homme et les technosciences, le défi ».
    http://technosciencesledefi.org/
    A un moment où il semble que la science galope en tête et bouleverse nos modes de vie, pas question de jouer la politique de l’autruche. Se renseigner, connaitre, apprendre, questionner, discerner est un devoir en cette question peut-être plus qu’en aucune autre.
    A Lille !

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  1. À Versailles, Thierry Magnin se penche sur les enjeux éthiques des technologies - LE WEB DES AMIS

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