La charte de l’écologisme chrétien

Par Christian Mellon

Quelques brèves notations à la lecture d’une ecncyclique extrêmement riche et courageuse. Tout d’abord il n’y a aucun doute à avoir : c’est un texte qui fera date. De même que Populorum Progressio a été la charte du « tiers-mondisme » catholique des années 70, Laudato Si va être, pour plusieurs années, la charte de l’écologisme chrétien.

La notion d’écologie intégrale – qui forme le 4° chapitre à l’encyclique (§ 134 à 155) – peut servir de clé de lecture à l’ensemble du texte : sans cesse le « social » (souci des plus pauvres) et l’écologique sont présentés comme étroitement liés : « Il n’y a pas deux crises séparées, l’une environnementale et l’autre sociale, mais une seule et complexe crise socio-environnementale. Les possibilités de solution requièrent une approche intégrale pour combattre la pauvreté, pour rendre la dignité aux exclus et simultanément pour préserver la nature »(139).

La volonté de ne pas minimiser la gravité de la situation (« les prévisions catastrophistes ne peuvent plus être considérées avec mépris ni ironie. »)(161), la grande sévérité de François pour les dirigeants de ce monde (qui font passer leurs intérêts avant le « bien commun ») et pour les comportements individualistes et consuméristes, n’empêchent pourtant pas une valorisation de la joie, de la paix, de la louange, ainsi qu’une invitation à contempler la beauté de la création. Ce texte a une belle tonalité franciscaine ! Que ce soit pour sauver la planète ou pour donner sens à nos vies, il faut renoncer à une relation toujours instrumentale aux créatures, ralentir la vitesse, faire silence… L’ascèse préconisée par le pape n’a rien de triste : c’est une « sobriété heureuse »

Il faut souligner la belle notion de « conversion écologique » (216-221), qui comprend à la fois du micro et du macro : changer de style de vie et changer la manière de faire de la politique au niveau mondial. Il y a là une clé opérationnelle, qui invite au local sans délaisser le global.

Les références explicites et systématiques aux principes fondateurs et régulateurs de la pensée sociale de l’Eglise  (le bien commun, la destination commune des biens, l’option préférentielle pour les pauvres, la subsidiarité et la solidarité) font entrer l’écologie intégrale dans la Doctrine sociale par la grande porte. Il y a là une volonté clairement assumée du pape : cette encyclique « s’ajoute au Magistère social de l’Eglise »

Enfin il faut souligner que, tout en ayant un ton heureux, nous sommes en présence d’une encyclique assez radicale qui va bousculer le camp des libéraux (c’est déjà le cas aux Etats-Unis)… Mais qui fera beaucoup d’heureux, notamment parmi ceux qui en attendent un soutien vigoureux à la cop21.

 

Christian Mellon, s.j., membre du CERAS et du CA des SSF

1 Commentaire

  1. Delair

    Merci Christian de faire ressortir les axes principaux de cette encyclique pour nous engager à en approfondir la nourriture pour notre foi et pour l’humanité entière.
    Comme à son habitude la formulation de ses prises de position fermes et sans ambiguïté ne ferment aucune porte mais invitent au « retournement ».

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