Par Dominique Quinio
Le temps est compté. Pour le président de la République et l’équipe gouvernementale, il s’agit de convaincre que l ‘été ne sera pas « vacant » ni « vacance » Du très long discours que le président de la République a prononcé à Versailles devant le Congrès, le 3 juillet, que retenir ? Le « bien commun universel », « basculé, transformé, menacé » sur le plan géopolitique ou écologique ? La nécessité de contrebalancer un exercice jupitérien du pouvoir présidentiel, par des contre-pouvoirs réels, notamment en rendant à la justice sa liberté et son autonomie ? Des réformes institutionnelles (moins de parlementaires, une dose de proportionnelle, moins de lois et des lois mieux évaluées, un conseil économique, social et environnemental repensé…) ? La réaffirmation de la valeur du travail pour chaque homme, dans un contexte de chômage de masse ? Le besoin d’une Europe refondée : car « l’Europe, c’est nous », sans nier que le projet européen se trouve fragilisé par la prolifération bureaucratique et le scepticisme. Un thème cher aux Semaines sociales qui préparent leur Session de novembre : « Quelle Europe voulons-nous ? ».
Qu’il soit permis de retenir surtout le constat de l’émiettement de notre société, de l’exclusion, de la pauvreté, de la relégation de tant de concitoyens. « Le sentiment d’appartenance existe moins qu’avant, nos sociétés modernes ont tendance à se fractionner au gré des intérêts, des égoïsmes, des idées de chacun, a expliqué Emmanuel Macron. Là encore, il nous revient de lutter contre les forces de division qui ne sont pas invincibles (…) Il n’y aura pas de réussite française si chacune et chacun n’y a pas sa place ». « Une vraie politique d’inclusion de tous », a-t-il promis. Ce qu’en d’autres mots, on pourrait appeler la recherche du bien de tous.
La contestation, il le sait bien, viendra légitimement de l’opposition dans les Assemblées, des manifestations de la rue ; elle viendra aussi du « cynique qui sommeille en chacun de nous ». On l’a constaté, dans les médias comme dans les conversations privées : à peine souligné le charme de la nouveauté, vient le doute, le soupçon, le désabusement : la crainte, en fait, que la promesse ne retombe comme un soufflet et que l’exercice politique revête trop vite ses habits anciens. Le cynisme exprimé pourrait n’être qu’une certaine manière de conjurer le sort. Ce contre-pouvoir de l’opinion publique, le président Macron doit l’accepter et le favoriser. S’il dit compter sur chaque Français, il faut qu’il en accepte les réactions et les colères, voire les incompréhensions et la versatilité. Il ne doit pas le redouter : une fascination béate serait très mauvaise conseillère.
« Faire à l’homme un pays digne de lui. », a conclu le président de la République. L’ambition paraît immense, démesurée – prétentieuse même, jugeront certains. Il place la barre haut, pour redonner de la grandeur au pays. Il s’agit surtout de faire de chaque homme l’acteur de sa propre dignité et de celle des autres, proches ou lointains, pour construire un pays à hauteur d’homme.
Dominique Quinio, Présidente des Semaines sociales de France
Post Scriptum. Si l’action politique continue durant cet été, notre Tribune, modestement, se met en repos. Le temps de reconstituer ses forces, d’analyser ses faiblesses, d’engranger vos remarques et vos suggestions, de penser son avenir comme lieu de réflexion et de dialogue, autour de la pensée sociale chrétienne. Bel été à tous.
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