Par Dominique Quinio
« La victoire sans appel de François Fillon aux primaires de la droite signe (de croix) le retour du vieux vote catholique réac en France ». Cette analyse politique, signée par Paul Ariès, du mensuel Les Zindigné(e)s et Christian Terras de Golias, a été publiée dans le quotidien Libération du 23 novembre. Fillon se présentant, selon les auteurs de l’article, comme le plus catho-compatible des candidats et jouant particulièrement de cette identité. Il ne s’agit pas de contester que François Fillon appartienne à la droite : il l’a clairement revendiqué. Et son programme économique et social ne laisse guère de doute.
Trois questions pourtant pourraient être posées aux auteurs de l’article. Est-ce un « retour » du vote catholique ? Est-il «réac » parce qu’il se reconnaît dans des positions sociétales qui ne sont pas « air-du-temps compatibles » ? Et, surtout, y a-t-il « un » vote catholique ?
En France, les catholiques (encore faut-il s’entendre sur la définition des catholiques : catholiques d’identité, catholiques pratiquants, catholiques engagés ?) votent majoritairement mais pas exclusivement, à droite ou au centre. Sans doute, la personnalité particulière de Nicolas Sarkozy et son hyper-présidence ont-elles conduit certains électeurs à se tourner vers François Hollande, lors de la précédente élection présidentielle. Peut-être s’attendait-on à ce que ces derniers portent plutôt leur voix vers Alain Juppé, à l’occasion de la primaire. Mais la campagne et les débats télévisés leur ont permis de « redécouvrir » un François Fillon, plus jeune et plus ferme, qu’ils connaissaient mal.
Deuxième interrogation : ce vote catholique serait-il par principe « réac » parce qu’opposé à certaines évolutions des mœurs ? La question mérite d’être creusée avec plus de finesse. Quelle que soit sa propre opinion sur le mariage homosexuel et ses conséquences en termes de filiation, on ne peut réduire les oppositions manifestées à des poussées d’homophobie. Christiane Taubira avait-elle-même défini sa loi comme « une réforme de civilisation ». Cette réforme ou d’autres touchant aux questions de société inquiètent, pour des raisons qu’il est trop simple de rejeter d’un revers de mot, un bon nombre de Français, pas forcément catholiques. Le monde politique et médiatique le mesure-t-elle assez ? Conservateurs, pourquoi pas ? « Réacs », ça se discute.
Troisième point : non, il n’y a pas « un » vote catholique. Les évêques français dans leur document « dans un monde qui change, retrouver le sens du politique » le rappellent, comme ils l’avaient fait en 1972 (« pour une pratique chrétienne de la politique ») où ils évoquaient le « pluralisme inconfortable et nécessaire » et plaidaient pour que l’Eglise catholique devienne le lieu privilégié de la confrontation des positions.
Des évêques et des communautés ont décidé de relever le défi dans de nombreux diocèses tout au long de la campagne. Les Semaines sociales l’ont fait à de nombreuses occasions lors de leurs Sessions nationales, et cette année encore autour du thème de l’Education. Manière de prendre la politique au sérieux et de ne pas la réduire aux analyses à l’emporte-pièce. Manière de respecter la diversité des électeurs catholiques, sans renoncer à rechercher, dans notre société divisée, le bien de tous.
Dominique Quinio
Présidente des Semaines sociales de France
Je croyais que C.Terras avait quatre vingt ans , depuis plus de 20 ans qu’il attaque l’Eglise par la gauche…?
Très bien l’article de D. Quinio (après tout elle est journaliste et elle écrit de bons articles). Ce qui prouve juste en passant que les deux autres, auxquels elle répond, sont de mauvais journalistes (ou pour être charitable, de moins bons).
Pourquoi n’a-t-elle pas publié dans Libé ?
Antoine Sondag