Par Mathieu Monconduit
Oui , il faut sauver le caractère solidaire de l’Assurance maladie, qui témoigne encore de la volonté de mettre à égale disposition de tous, riches ou pauvres, habitants des villes ou des campagnes, les ressources de soins adaptés à leur état de santé. Oui il y a de nombreuses pistes pour améliorer l’efficience de notre système de santé, réduire les facteurs géographiques, financiers , ou culturels, d’inéquité de l’accès aux soins. Ces pistes ont des noms : décloisonnement entre les acteurs de santé, continuité et cohérence des prises en charge d’une même personne tout au long d’un même épisode pathologique ou de séquences successives ( de « petits risques » , graines de « grands risques » ?) d’une maladie chronique ou d’un handicap, évaluation de la pertinence, médicale et économique, de ces prises en charge, révision du modèle de reconnaissance et de rémunération des acteurs de santé, comme des établissements, jusqu’à présent fondé sur la segmentation en actes et non sur la maladie et le soin à la personne. Les assurances complémentaires n’interviennent dans aucune de ces pistes d’amélioration ; au contraire malgré l’intense concurrence existant entre elles, leur présence, en augmentant la solvabilité des patients, contribue au développement de pratiques non validées ou de dépassements d’honoraires. Par le montant des cotisations pour bénéficier des meilleurs remboursements des segments de soins quasi abandonnés par l’Assurance Maladie (dentaire , optique, audition), les assurances complémentaires sont au contraire facteurs d’inégalités d’accès aux soins. L’enquête de Que Choisir (29 Juin 2016)[1], relève que sur 4 ans, l’offre des spécialistes au tarif de la sécurité sociale a reculé pour plus de la moitié des usagers, quelle que soit la spécialité étudiée. Cette progression des dépassements d’honoraires, signe l’échec du « contrat d’accès aux soins » (paiement de leur cotisations sociales versus « modération » des dépassements, qui a coûté 8 fois plus qu’il n’a rapporté…). La sauvegarde du caractère solidaire de notre système de santé, pour imparfait qu’il soit, mérite mieux que des mesures réductrices des problèmes existants, mieux qu’une généralisation du tiers payant, mieux que la définition de risques supposés petits, coupés de leur contexte et métamorphosés en actes techniques et remboursés selon les ressources de chacun pour payer sa « complémentaire santé».
Mathieu Monconduit, Membre du Conseil des Semaines Sociales
[1] https://www.quechoisir.org/action-ufc-que-choisir-acces-aux-soins-en-france-la-fracture-s-aggrave-n21799/