Par Jean-Pierre Rosa
Face à l’installation au Moyen-Orient d’un Etat qui se pose en défenseur et propagateur de l’islam par le moyen de la terreur, deux questions se posent : comment en est-on arrivé là ? Que faire ? Sans remonter jusqu’au califat de Bagdad, jetons un regard sur le passé récent.
Qui se souvient de Gamal Abdel Nasser et de l’Unité arabe ? Qui se souvient d’Oum Kalsoum, la plus grande chanteuse du monde arabe, soutenant l’Egypte et l’unité arabe de toute l’énergie de sa voix ? Qui se souvient des liens de la Syrie et de l’Egypte qui formèrent, pendant plusieurs années, un seul pays, la République Arabe Unie ? Le panarabisme était alors marqué par une volonté de s’émanciper – déjà – de l’Occident, de créer un monde moderne, laïc… Saddam Hussein et Hafez-el-Assad faisaient partie des acteurs de cette mouvance.
Mais déjà à cette époque Nasser et l’unité arabe avaient trois problèmes : Israël – la guerre des six jours marqua le début de son déclin, l’Iran – Nasser soutint les rebelles fanatisés contre le Shah, et l’Arabie Saoudite enfin qui fit appel aux Frères musulmans dans son combat contre le Raïs. Et ces trois « problèmes » avaient tous le même allié : les Etats-Unis.
Histoire ancienne dans l’Orient compliqué ? Certes, mais il n’y a pas besoin d’avoir fait Harvard pour comprendre que le poids acquis par le Wahabisme et le Salafisme dans le monde arabo-musulman sunnite est lié à la montée en puissance de l’Arabie Saoudite obscurantiste et des émirats du Golfe – soutenus par les Etats-Unis, et ce au détriment de l’unité arabe menée par l’Egypte, bien trop liée à la mouvance soviétique pour encaisser le choc du déclin russe.
Le soutien apporté à l’Arabie Saoudite par la France est aujourd’hui un vrai scandale lorsqu’on connaît les liens idéologiques et parfois financiers entre les Saoudiens et les fondamentalistes de Daech. Bien sûr François Hollande ne pouvait pas savoir que l’annonce de ses contrats de 10 milliards d’euros avec l’Arabie Saoudite serait suivi par les massacres de l’EI. L’EI n’est pas l’Arabie Saoudite ? Non, elle en est l’aboutissement.
Face aux tueries de ces derniers jours, nous restons désemparés. La première réaction, de bon sens, ne consisterait-elle pas à appeler la France à cesser tout commerce avec l’Arabie Saoudite ? Ce n’est pas chose facile puisque notre approvisionnement en pétrole dépend pour presque 20 % des pays du Golfe. C’est sûr mais nous sommes en guerre ! Qui reprendra les mots célèbres : « je vous promets de la sueur, du sang et des larmes » ?
Par Jean-Pierre Rosa, de l’équipe du blog