Par Jean-Pierre Rosa
Ce mot d’ordre – qui forme le titre d’une chanson du chanteur ivoirien engagé Tiken Jah Fakoly – apparaissait , il y a peu, comme une formule irréaliste lancée par quelques altermondialistes irresponsables. Les politiques est les experts lui opposaient la souveraineté des États en matière de politique migratoire et la théorie bien enracinée de l’ « appel d’air » que cette mesure constituerait. Or les choses sont en train de bouger.
Tout d’abord la guerre qui sévit au Moyen Orient pousse à la fuite. Malgré toutes les dispositions légales et policières, les migrants ne cessent d’affluer en Europe dans des conditions de plus en plus dramatiques. Ensuite l’Allemagne vient d’augmenter de façon massive sa capacité d’accueil des réfugiés politiques et la chancelière fait la leçon à l’Europe entière en assortissant ses conseils de menaces à peine voilées en direction des pays de l’Est, prompts à rejoindre l’Europe riche et libre mais peu partageux. Enfin la diffusion toute récente de la photo d’un enfant Syrien trouvé mort sur une plage Turque touche l’opinion.
Il faut dire que le mouvement était amorcé depuis quelque temps : les chercheurs, experts et spécialistes sont en train de revenir sur cette idée de contrôle des flux migratoires en avançant plusieurs arguments qui, chiffres à l’appui, viennent battre en brèche la doxa. Certains d’entre eux, il faut l’avouer, sont purement utilitaristes : le nombre de migrants n’augmenterait pas (le fameux appel d’air est un mythe), les passeurs seraient réduits au chômage (moins coûteux en vies humaines et en forces de police!), les migrants, sûrs de passer dans les deux sens, rentreraient plus facilement et pourraient ainsi faire bénéficier les pays de départ de la richesse matérielle et immatérielle créée et reçue. Mais les mêmes chercheurs mettent aussi en avant le bénéfice « moral » pour les pays de départ comme pour les pays d’accueil : intégration plus facile, départ mieux vécus.
Il est heureux de voir ainsi le monde des politiques et des spécialistes reprendre enfin à leur compte un des piliers de la Déclaration universelle des droits de l’homme. Et rejoindre du même coup un des enseignements constant de l’Église catholique en la matière – comme le soulignait la session 2010 des Semaines sociales de France. Il y a là un espoir timide pour une poussée migratoire immense qui donne une idée des attentes qu’elle révèle. Il ne faudrait pas que ce frêle espoir soit entravé par les réflexes de repli qui forment le fond de commerce des partis populistes en Europe.
Jean-Pierre Rosa, équipe du blog
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