Par Claire Chalain
J’ai été choquée d’entendre les gens dénoncer dans un bel ensemble les assassins des derniers attentats commis à Paris au Bataclan et ailleurs. Pour la plupart ce sont des monstres, des barbares, des personnes à éliminer. Pas un mot pour comprendre ces enfants de la République égarés. Je n’ai décelé qu’exceptionnellement une prière pour les terroristes et leurs familles.
Or excusez-moi, mais je sais ce que c’est que d’être liée à un assassin : un de mes cousins – je peux en parler librement car il est mort il y a peu – a participé en tant que membre de l’OAS à de multiples crimes, assassinats et attentats. Arrêté puis jugé, il a été condamné à mort et – au bout de plusieurs années de détention – a été gracié quinze jours avant sa mort par De Gaulle.
Sa famille déjà chancelante n’a pas résisté à l’universelle réprobation des bonnes âmes. Ses enfants se sont exilés. Sa mère est restée dépressive jusqu’à sa mort. Moi je n’étais qu’une enfant mais je me souviendrai toujours de la joie mauvaise de la voisine me mettant sous le nez le journal où s’étalait au grand jour le nom de mon cousin, son crime impardonnable et toute la vie de la famille. Pour tous les miens, c’était la honte.
C’est pourquoi aujourd’hui, en pensant aux crimes terroristes atroces qui ont été commis, je ne peux m’empêcher de penser, au-delà des victimes et de leurs familles vers lesquelles bien sûr notre pensée doit d’abord se tourner, à leurs meurtriers et à leurs propres familles.
Vous avez vu les photos d’ Abdelhamid Abaaoud ? J’ai été frappé par le jeunesse et le rire de cet enfant. Oui, enfant. Sa mort, inévitable vu les circonstances, me semble être une défaite. Une défaite de cette fraternité qui s’affiche au fronton de nos édifices. Abdelhamid n’avait-il pas trouvé une fraternité de remplacement, une fraternité sectaire certes, mais une fraternité tout de même, une fraternité d’armes dans ses frères de combat ? Sur quels abîmes, sur quels déserts une telle fraternité de mort peut-elle pousser ?
Pour faire vivre positivement la fraternité de la République, ne devons-nous pas saisir toutes les occasions pour lutter contre les exclusions qui permettent à de « faux-frères » de s’insinuer dans nos manques ?
Claire Chalain, adhérente de l’association des SSF
La prière, c’est pour tous, certes.
Que pensez-vous de ce témoignage du 13 novembre, après la décapitation d’un jeune, de l’autre côté de la Méditerranée?
https://m.youtube.com/watch?v=-kxuIolboIc