Par Paul Champsaur
Les médias signalent parfois la situation défavorable des femmes. Les plus hauts postes, cadre dirigeant d’entreprise ou haut responsable politique, ne sont pas répartis également entre les hommes et les femmes. Il en est de même, quoique de façon moins marquée, dans le domaine de la culture où existe une compétition libre entre les hommes et les femmes. Seuls 13% des très hauts salaires sont versés à des femmes. L’évolution vers plus d’égalité, commencée il y a longtemps semble néanmoins continuer. La proportion de femmes parlementaires dans le monde, quotas électoraux aidant, a doublé de 1995 à 2015 (22% aujourd’hui contre 26% pour la France et 38% pour l’Europe). Le taux de chômage des femmes en France est aujourd’hui inférieur à celui des hommes alors qu’il était par le passé nettement supérieur. Certain pays, notamment scandinaves, sont en avance sur ce chemin et l’espoir est permis. Mais il est bon de faire le point.
A emplois identiques (CDI à plein temps), les femmes gagnent en France 20% de moins que les hommes dans le secteur public comme dans le secteur privé. Cet écart s’explique en partie par des différences repérables, telles que le temps de travail. D’autres le sont moins telles l’expérience professionnelle ou les interruptions de carrière. Cependant le progrès, même lent, devient sensible sur longue période : en 1950 les femmes cadres gagnaient moitié moins que les hommes.
Les femmes ont beaucoup progressé dans le domaine de l’éducation. Partout les petites filles travaillaient mieux à l’école que les petits garçons. En France les filles quittent le système scolaire avec plus de diplômes. Pour les jeunes nés au début des années 80, quand ils avaient entre 25 et 29 ans, 53% des filles étaient sorties du système éducatif sans diplôme ou avec, au plus, un diplôme du secondaire (CAP, BEP, baccalauréat) contre 63% des garçons. Les jeunes filles représentent 57% de la population étudiante. Leur proportion varie beaucoup selon les domaines. Si celle-ci est supérieure à 70% dans les formations paramédicales et en lettres, supérieure à 60% en médecine, odontologie et pharmacie, de l’ordre de 50% dans les écoles de commerce, elle est de moins de 40% dans les formations universitaires scientifiques et de 25% dans les écoles d’ingénieurs. L’orientation des jeunes filles est due en partie à des goûts différents mais aussi à une proportion plus faible chez elles que chez les garçons qui atteignent un haut niveau en sciences et en mathématiques.
L’attention des femmes à l’égard des enfants est le principal exemple de rôle que les femmes souhaitent assumer ou que la société attend d’elles qui les différencie des hommes. Le taux d’activité et le temps partiel masculins ne sont pas influencés par le nombre et l’âge des enfants. Par contre, le taux d’activité féminin passe de 91% si elles n’ont pas d’enfant à 38% si elles en ont trois, dont un de moins de 3 ans. Le taux de temps partiel passe de 16% à 51%. 9 sur 10 des familles monoparentales ont à leur tête une femme qui, souvent, ne travaille pas si elle a un enfant très jeune.
Sur longue période, la situation relative des femmes s’améliore. C’est général dans les pays occidentaux. L’amélioration va certainement continuer. Mais, compte tenu de leur rôle particulier à l’égard des enfants, il est trop tôt pour savoir si les femmes atteindront la parité.
Paul Champsaur, économiste et statisticien, est inspecteur général de l’Insee et conseiller spécial de Jean Tirole, prix Nobel d’économie 2014