Par Catherine Belzung
Les médias ont en parlé, enfin: dans les mois qui viennent, des millions de personnes risquent de mourir de faim en Afrique de l’Est (Somalie, Ethiopie, Kenya), au Yémen, au Soudan du Sud ainsi qu’au Nigeria, au Tchad et au Niger. Même si les chiffres sont difficiles à vérifier, il est question de vingt millions de personnes confrontées à une situation de famine, et de 50 autres millions dans une situation de grave insécurité alimentaire. On parle de 7 millions de personnes au Nigéria, de 7 millions au Soudan du Sud, de 6 millions en Somalie (soit la moitié de la population), de 7 millions au Yémen. Et cette situation est absolument sans précédant, puisque cette famine touche de façon concomitante plusieurs pays, situés parfois à des milliers de km les uns des autres.
Comment en est-on arrivé là ? Classiquement, on attribue les situations de famine à des facteurs environnementaux sur lesquels nous n’avons pas de prise, comme l’absence de pluie, les invasions d’insectes ravageurs, etc. C’est en effet ce qui se produit en Afrique de l’Est (Somalie, Ethiopie, Kenya). Néanmoins, ce facteur n’explique pas à lui seul l’ampleur de cette crise : les chiffres alarmants cités plus haut sont liés aussi à des facteurs humains, parmi lesquels les guerres et l’afflux de réfugiés.
En effet, parmi les pays concernés, nombreux sont ceux touchés par des conflits armés, ce qui empêche l’accès à la nourriture pour les populations civiles. En effet, au Soudan du Sud sévit une guerre civile qui a entrainé le déplacement de 1.8 million de personnes (d’après le Bureau de la Coordination des Affaires Humanitaires des Nations Unies). Notons au passage que le pays tire 97% de ses revenus du pétrole, et qu’au moins la moitié de ses dépenses concernent l’achat d’armes. Au Nigéria, un pays qui a vu ses récoltes de céréales augmenter de 5% en 2016, la situation de famine est liée à la présence du groupe terroriste Boko Haram : en effet, ce groupe armé a empêché les paysans de faire des cultures ou d’accéder au lac Tchad pour y abreuver les troupeaux, et le conflit empêche à présent l’accès des zones sinistrées aux convois acheminant de l’aide humanitaire. Notons, là encore, que 40% des armes de ce groupe qui ont pu être saisies sont de fabrication française (provenant de parachutages français effectués dans le désert libyen). Enfin, au Yémen, un pays très fortement touché par la famine, sévit un conflit meurtrier opposant les rebelles houthistes et une coalition internationale menée par l’Arabie saoudite. Notons, une nouvelle fois, que la France a exporté pour 115 millions d’euros d’armes à la monarchie en 2015. Enfin, notons que d’après le Haut Commissariat des Nations Unies pour les Réfugiés (HCR), deux autres pays touchés par le risque de famine, l’Ethiopie et le Kenya, sont respectivement le 5ème et le 6ème pays au monde accueillant le plus de réfugiés. Ils sont par exemple 820 000 en Ethiopie, un pays qui a pratiqué une exemplaire politique de la « porte ouverte ». Réfugiés qui viennent bien sûr d’autres pays en guerre.
Alors, que faire ? Bien sûr, la situation étant urgente et les populations étant menacées par la famine, il faut effectuer des dons aux différents organismes acheminant de l’aide humanitaire dans les pays touchés. Mais il faut aussi, en cette période électorale, mener une action citoyenne pour demander un embargo sur les ventes d’armes envers certains pays comme le Soudan du Sud ou l’Arabie Saoudite et participer davantage à l’accueil de migrants. Car si, dans ce monde globalisé, nous partageons informations et richesses, nous partageons aussi de plus en plus les responsabilités pour les souffrances endurées partout, en raison de notre indifférence et de notre manque d’engagement.
Catherine Belzung, membre du CA des Semaines sociales de France
Non ,il n’est pas raisonnable d’accuser les Français d’être responsables de ces guerres, au motif que des armes françaises y sont utilisées…
Ce n’est en aucun cas la France qui est en quoi que ce soit responsable de la situation qui mène à ces guerres
Merci de ce commentaire. La France n’est pas seule responsable, mais elle est co-responsable de ce drame, avec d’autres facteurs et d’autres agents..